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La journée de la terre en Palestine

Publié le samedi 26 mars 2016

"Toutes nos cités sont construites sur les ruines de villages arabes, et nous ne rasons pas seulement leurs murs, mais nous essayons de rayer leurs noms des livres d’histoire. Ils ont donc de très bonnes raisons de lutter contre nous. Si j’étais arabe, je combattrais certainement pour Al-Fatah." Moshé Dayan (nommé ministre israélien de la défense en 1967)

Le 30 mars 2016 aura lieu la 40e journée de la terre. A Deisheh, nous l’avons commémorée ce vendredi 25 mars. Rappel historique et récit de cette journée particulière.

La journée de la terre, c’est quoi ?

La journée de la terre commémore le massacre de Sakhnin, le 30 mars 1976, où 6 palestinien.ne.s ont été assassiné.e.s par l’armée israélienne.

Le 19 février 1976, le gouvernement israélien annonce la confiscation de 2500 hectares de terre appartenant à des palestinien.ne.s en Galilée. Il s’agit de poursuivre le « plan de judéistation de la Galilée » [1] élaboré dès 1953 par Joseph Nahmani et mis en place Ben Gourion [2].

Le 30 mars 1976, ceux et celles qu’on appelle les « arabes d’Israël », c’est-à-dire les palestinien.ne.s vivants en Palestine 48, se mettent en grève pour dénoncer une politique de négation de leurs droits, de confiscation et d’annexion de leurs terres.
Les palestinien.ne.s de Cisjordanie et de Gaza suivront, en solidarité.

La répression de l’armée israélienne fut très brutale : 6 mort.e.s, plus de 100 blessé.e.s et des centaines d’arrestations à Sakhnin, à une vingtaine de kilomètres au nord de Nazareth.

Le Jour de la Terre devint ainsi celui du réveil politique des Arabes d’Israël, "ces oubliés que l’on croyait éteints, brisés, résignés sinon intégrés" [3] et « qui se découvrent alors, comme les autres palestiniens, victimes du même processus de dépossession qui ne se poursuit pas seulement aujourd’hui dans les Territoires occupés mais en Israël même, en Galilée et au Neguev. » [4]

Depuis, le 30 mars est commémoré comme la Journée de la terre pour les Palestinien.ne.s de 48 ainsi que celles et ceux de Cisjordanie et de Gaza.

Ce matin, nous nous mettons donc en route pour commémorer cette journée, organisée sous forme de marche de Beit Jala à Battir.

Bonne surprise en arrivant au lieu de rendez-vous : environ 200 personnes sont déjà présentes. A eux s’ajoute notre groupe, nous sommes une cinquantaine de jeunes d’Ibdaa et Laylac (les deux principaux centres culturels de Deheishe), ainsi que de Badil, une association qui lutte pour les droits des réfugiés.

10h, départ de la marche. L’ambiance est bon enfant, on distribue des tee shirt, les derniers drapeaux et quelques bouteilles d’eau.
On se rend compte assez vite que des soldats israéliens nous observent. Les drapeaux se lèvent avec plus d’ardeur.

Nous passons devant l’entrée du tunnel ralliant Bethléem à Jérusalem, une route empruntée aussi bien par des colons que par des palestinien.ne.s titulaires du fameux sésame permettant de se rendre à Jérusalem. En passant à notre hauteur, les conducteur.trice.s des voitures alternent donc entre cris d’encouragement et gestes franchement obscènes.

Cette marche, c’est aussi l’occasion de redécouvrir le magnifique patrimoine palestinien. Les plaines rocailleuses, les cultures d’oliviers en terrasse, les vieilles bâtissent en pierre.

Vers midi, on s’arrête pour manger. L’occasion pour les plus vieux (ceux de notre âge, en fait, merde) de lancer un quizz historique et politique à destination des plus jeunes. Les gagnant.e.s remportent des livres d’Histoire.

14h, on arrive à Battir, accueilli.e.s à l’écomusée du paysage. On grignote, on boit du café, on parle politique et on se prend en selfie.

14h30, les bus viennent nous chercher.
Cette marche, c’était l’occasion de parler du 30 mars 1976, des confiscations de terres et des expropriations, l’occasion de transmettre aux enfants l’héritage culturel palestinien, de leur transmettre, aussi, la mémoire de la lutte pour leurs droits.

1976… 2016… 40 ans nous sépare aujourd’hui de ce soulèvement. 40 ans durant lesquels les terres des palestinien.ne.s n’ont cessé d’être colonisées par Israël.
Aujourd’hui, les campagnes de colonisation s’accélèrent.

Il y a une semaine, les habitant.e.s de 3 villages se sont vu remettre un ordre d’expropriation, Israël s’appropriant 1,2 km² de leurs terres.
Plus tôt dans le mois ce sont 2,5 km² qui ont été confisqués dans le district de Jericho.

Dans la vallée du Jourdain, le bureau de coordination des affaires humanitaires des nations-unis (OCHA) déplore l’expulsion de 87 habitant.e.s du village de Khirbet Tana, dont 35 enfants, depuis le mois de janvier.

Un projet de colonisation (9000 m² ) a également été entériné par les autorités israéliennes à Jérusalem Est, comme ultime affront fait à la population palestinienne, au nez et à la barbe de la communauté internationale.

40 ans d’expulsions, d’humiliations et de piétinement du droit international durant lesquels, malgré tout, la population n’a jamais cessé de résister.

Mais au train où vont les choses, si la communauté internationale continue de soutenir ainsi la politique de colonisation israélienne, que restera-t-il de la Palestine dans 40 ans ? La projection glace le sang...

C et To

[1] Extrait : "Bien que la Galilée occidentale ait été occupée, elle n’a toujours pas été libérée de sa population arabe, ainsi que cela s’est produit dans d’autres parties du pays. Il y a toujours 51 villages et la ville de Nazareth dont les habitants ne sont pas partis.
En tout, il y a là 84 000 Arabes, sans compter Saint Jean d’Acre, qui contrôlent 929 549 dunums [...] l’existence même d’un groupe arabe homogène dans cette partie du pays est une invite aux Etats arabes à avancer leurs revendications sur cette région [... Il est donc essentiel de disloquer cette concentration d’Arabes au moyen de colonies juives [...]"

[2] Voir l’entretien avec Ben White : « Galilée et Neguev, la judéisation comme facteur clé de l’aménagement du territoire » : http://alencontre.org/moyenorient/palestine/galilee-et-neguev-la-judeisation-comme-facteur-cle-de-lamenagement-du-territoire.html

[3] Sous Israël la Palestine, Ilan Halevi

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