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Encore une fois…

Publié le mardi 17 mai 2011

Il y a deux ans, lors d’un autres séjour en palestine, j’avais été retourné dans mes représentations. Ayant passé le début de soirée avec un ami palestinien et son ami qui pour moi avait l’attirail du beauf parfait : grosse 4*4, de l’argent a jeté par les fenêtres, « regardez moi, je suis là »… La soirée passée ensemble m’a permis de le rencontrer, et là, j’ai compris plus de choses…

Hier soir (16 mai 2011), nous sommes arrivés à Naplouse et y avons été accueilli par les amis de l’association qui nous y accueille. Assis en ligne dans les fauteuils et canapé, en buvant toujours plus de thé et fumant cigarettes sur cigarettes nous avons discuté, rit, profité de la nuit tombante. Ancré dans mes repères, mes codes et mes positions d’européen de l’ouest, j’ai été choqué par une chose qui s’est joué tout au long de la soirée, la manière dont il interpellait, dont il se moquait de l’un d’entre eux, S. un jeune homme sourd, et dont il le faisait tourné en bourrique.

La soirée continue, ils commencent à le charrier sur ses opinions politiques, ils semble être proche de fatah. Les autres personnes présentent s’amuse donc à montrer une à une les personnes présentes et à l’interroger « fatah ou hamas ? ».

Je suis assit à côté de M., à l’origine de ce jeu, qui me dit qu’il n’aime pas parler de politique, que cela le stress, le rend nerveux, lui fait perdre ses moyens, il me confie son point de vue : « Je n’aime ni le fatah, ni le hamas (…) Imagine toi, tu as 4 frères. Un jour tu es seul dans ta maison et je viens chez toi avec deux gars, nous venons pour tout foutre en l’air et te voler puis nous repartons. Que vas tu faire ? Vas tu te disputer avec tes frères ou vas tu les appeler et venir nous voir ? Avec le Fatah et le Hamas, c’est la première réponse que nous vivons. Je n’aime pas les politiques qui ne cherchent que l’argent ou le pouvoir, je suis palestinien, avant tout palestinien. »*

Je lui parle un peu de la société dans laquelle je vis, de mon rapport à la politique et il me répond en continuant et en illustrant. « Avant il me fallait 45 minutes pour aller à Ramallah, ajourd’hui 2 heures. En 48, les palestiniens voulaient toutes les palestine ; en 67, ils en demandaient la moitié, aujourd’hui, ils ne veulent plus du mur et des colonies… et demain que demanderont-ils : l’ouverture des cheks point ? Les israèliens nous ont pris la moitié de notre terre, avec les colonies ils envahissent l’autre moitié, puis les routes… et demain ? Ma maison ? Et pendant ce temps Abou Mazen parle de paix, il veut faire la paix, il parle, il parle, il parle… mais il ne fait rien. C’est pareil avec tous les partis politiques… »*

Suite à cette discussion, le silence de la nuit se refait entendre, puis revient le refrain « Kifak Wahash ? (comment va tu le grand ?) ». La discussion reprend. Ils se rappellent de souvenirs qui semblent très présents dans leur mémoire, sans doute en lien avec leur notion de politique et en lien avec les manifestations du week end et de la comémoration de la Nakbah. « Comment ne pas avoir la rage quand des frères se font tué et que les politiques ne font rien ? » demandaient M. plus tôt dans la soirée ; puis, ils nous avaient montrer des vidéos du week end sur les actions de l’armée israèlienne et les passage à tabac des manifestants.

La discussion prend la forme d’un échange entre les amis palestiniens, échange de souvenir, de moment de jeunesse, de bout de vie, avec pour toile de fond la deuxième intifada.

Un passage d’examen : Nous étions dans la rue pour aller aux examens, nous avons été contrôlé par les militaires. Un tank est arrivé, je dis en rigolant « il pourrait tirer et tous nous tués », mon ami me réplique « mais non ». Deux minutes plus tard, un militaire tire une rafale et tous les étudiants présents tombent mort, ils s’en est fallu de 2 minutes. »

Humour : Un adulte veut aller voir les soldats qui contrôle les identités dans la rue, il veut lui parler, le questionner, il s’avance donc vers les militaires en disant « I want to ask something, i want… ». Le soldat lui envoie un coup de pied dans le ventre, il se plie en deux « I don’t want to ask… » et il part.

Les amis rient et continuent…

fatalité : Les militaires sont venus dans la maison de M. dont le frère est en prison, ils cherchent quelque chose, ils menacent de détruire la maison dans les jours qui viennent. M. y repense dans la journée puis va voir son ami et lui dit : « Je veux te passer mes habits ! ».

Nos amis s’esclaffent et commentent : « ils vont détruire la maison et lui ne pense qu’à ces habits !!! »

Chemin de l’étudiant : Un jour, les militaires font une perquisitions dans le camp, ils prennent tous les hommes et les menotent avec du plastique, les mains dans le dos. M., A. et M. sont ensemble avec d’autres amis, un d’entre eux réussit à défaire ses menotes qui le sert trop fort. Ses amis le voit et lui demande de défaire les leurs… Ce faisant, ils sont vus par un militaire qui arrive sur eux, leur crie dessus et sert les menotes encore plus fort. Tellement que la main de A. double de volume.

Vendeur Polyvalent : Sur le chemin de l’université, un homme vend des babioles. Avec un haut parleur, il fait ses promotions. Pendant le première intifada, il avait pour habitude de faire des promotions un peu spéciales « Les tanks arrivent, attention !! » « C’est bon, ils sont partis… »

Comme le disait M. plus tôt dans la soirée « ce ne sont que des exemples et il sont nombreux ». La soirée continue sur ces partages de bouts de vies, en rigolant, en buvant du thé, avec un refrain qui ponctue la soirée « Kifac Wahash ? ».

*discours réécrit suite à une prise de note en fin de soirée

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