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L’inhumanité et la terreur au rendez-vous...

Publié le dimanche 24 mars 2013

Il est 20h30. Je suis en compagnie de Sonia, Julie, Cynthia, Alexandre et Maxime. Na. nous accompagne chez une famille du camp de Dheishe. Il y a le père, la mère, la fille, et trois garçons qui sont là. On est accueillis à bras ouverts, avec un café, puis du thé. A., un des fils, vient de sortir de prison. Il retourne en cours demain, avec l’espoir de pouvoir aller au lycée l’an prochain. H., l’aîné, a passé la soirée avec nous pour nous parler de son vécu en prison. C’est une famille de six personnes, qui sont tous allés en taule, pour de multiples raisons, la première étant le fait qu’ils soient tous activistes.

Ici en Palestine, la prison devient presque obligatoire à partir de l’âge de 15 ans. C’est comme un rituel. Comme une espèce de porte par laquelle tu dois passer pour plus ou moins vivre. Personne n’est jamais en sécurité. Tous les soirs, c’est « Est-ce que cette nuit des soldats israéliens vont frapper à ma porte pour m’arrêter ? » ou « Est-ce que quand je me réveillerai demain matin, j’apprendrai que mes voisins se sont fait embarquer.. ? » Vivre dans cette situation d’occupation, c’est avoir peur en permanence. A chaque fois qu’elle entend un bruit, quel qu’il soit, N., la mère, se lève pour regarder par la fenêtre. Elle a peur. Sans cesse.

La première question que je pose à H., c’est « Pourquoi tu es allé en prison ? ». A cette question, je n’obtiens pas vraiment de réponse concrète. Il part dans une discussion de la situation politique ici, du fait que les palestiniens n’ont aucun répit, presque aucun droit, et qu’ils doivent se battre (mentalement et activement) en permanence. Au début, on a tous un peu de mal à suivre. Il y a des traductions de l’arabe à l’anglais, puis de l’anglais au français.
H. nous explique que le but des israéliens est de diviser pour mieux régner. Ils séparent des familles, des amis, en envoyant les palestiniens en prison. Mais comme ici énormément de personnes sont en prison, ils finissent tous par retrouver leurs proches là-bas. Et ça les rend dix fois plus fort...
Il y a énormément de phrases marquantes pendant cette discussion. Des phrases qui pour nous sonnent tellement juste, des phrases auxquelles nous n’avons peut-être jamais pensé.. Des idées qui nous sont cachées par le système.. H. emploie des mots forts.
« Ce n’est pas contre l’occupation, qu’il faut se battre. Mais contre tout un système. »
« La meilleure chose que l’on a à faire, c’est résister. »

Il parle beaucoup de la situation de politique de la Palestine, mais il compare beaucoup avec le reste du monde. « Vous, en France, vous avez la crise économique. Les riches et les pauvres. Vous devez vous battre contre le capitalisme. On est tous sous occupation. Qu’elle soit directe comme indirecte. »
« Comment faire pour aller tous ensemble dans le même sens, malgré tous les problèmes que chacun rencontre ? »

H. et Na. nous expliquent beaucoup de choses. Ca fait du bien d’avoir un point de vue différent de ceux que l’on a déjà croisés. On se rend compte, petit à petit, de la réalité. Malheureusement, on se sent un peu petit face à tout ça. Ca nous met un peu la rage. On aimerait changer le monde. On aimerait crier partout ce qu’on voit dans ce pays.

L’enjeu principal, nous explique Na., c’est le retour des réfugiés dans leurs villages d’origine. Est-ce qu’un jour ils verront la lumière du jour ? Est-ce qu’un jour ils pourront dormir sans se réveiller la nuit de peur de se faire arrêter ? Ce sont des questions sans réponses... Et c’est très difficile à encaisser.

Ensuite, c’est Na. qui prend la parole. Il nous raconte une multitude d’histoires qu’il a vécues, ou entendues. Il est resté six mois en prison pour avoir fait venir un camion rempli de nourriture pendant un couvre-feu dans le camp de Dheishe. Il a passé dix ans en prison, en tout, dans sa vie. (Il est âgé de 53 ans. Mais il en fait 10 de moins..)
Il y a des choses qu’il a vécues qui sont assez inhumaines.
Quand il se faisait interroger par les soldats israéliens, il s’est fait bander les yeux, attacher les mains et les pieds, asseoir sur une chaise, et les deux pieds arrière de sa chaise ont été sciés, pour qu’il soit instable et ne puisse pas trouver le sommeil.
Encore un anecdote ? Allez, pour la réalité...
Na. faisait partie de 40 prisonniers, emmenés dans le désert pour une plus grosse « punition ». Ils ont fait trois groupes de prisonniers, entourés de barbelés, entassés dans le sable, et pointés avec une mitraillette par les soldats qui les entouraient. Ils n’avaient droit à ni eau, ni nourriture, ni douche, ni couvertures, et étaient entourés de scorpions et de serpents, sous 45°C. A un moment, tous les prisonniers se sont levés pour réclamer à boire, et se sont rapprochés des barbelés. Le soldat le plus haut gradé s’est avancé.
« Qu’est-ce que vous voulez ? Dégagez !
— On veut juste de l’eau ! On ne vous demande pas l’impossible, mais juste de l’eau. C’est dans nos droits.
— Dégagez ou je vous bute.
— Très bien, allez-y, butez-nous. »
3 morts et 22 blessés.

Je ne sais pas s’il est nécessaire d’en dire plus après tout ça. Israël emploie des méthodes infâmes afin d’arriver à ses fins. Du gavage de prisonniers, en passant par la cellule d’1m20² sur 7m de hauteur, ou de coups de crosse du genre un « prisonnier pour un soldat ».

Il y a peut-être certaines choses qui ont été mal exprimées. Mais il est très difficile de mettre des mots sur des images et des paroles horribles à écouter.
Il faut que le monde change...

Aurore.

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